- INSTATICITÉ ?... Vous avez dit instaticité ?

- Comme c’est instatique !

- Je vous assure, cher Instatic, que vous avez dit instaticité

 

Si la staticité est la propension à rester statique

Gageons que l’instaticité est la propension à ne jamais rester statique.

 

N’est-ce pas le propre de l’être humain ?

De l’être vivant

Tout simplement ?

Toujours en mouvement

Même immobile.

De sa naissance à sa mort,

Tout être n’a de cesse 

Sans cesse

De bouger, évoluer, se transformer, créer,

Grandir, procréer, transmettre, prospérer

 

- Instatique dès sa naissance ? 

- Même bien avant

Il lui a fallu voyager de petites cellules

En jet spermato

Vers l’ovule

Pour arriver parmi nous illico

Etre là, et, déjà, être plus loin.

- Instatique jusqu’à sa mort ?

- Même bien après

Demandez à Oscar, le squelette de la classe

S’il ne se fait pas de vieux os

Si ses tibias ne le démangent pas trop 

Au fil du temps ?

Et là, au bout du village africain

Ce curieux arbre, l’arbre des défunts

Où les âmes des morts habitent 

Et, la nuit, le quittent 

Pour voyager, planer, papoter, inventer

Les blagues à faire aux vivants

Pas tranquilles

Quand dans les branches souffle le vent

C’est leur rire qu’on entend

Cher Instatic !

 

- Instatic ?Vous avez dit Instatic ?

- Nous sommes tous de la confrérie des Instatics

Qui, dans ce monde, veillent à ce que jamais 

Ne cesse l’instaticité.

 

 

 

 

Un soir de lune rouge

 

Méfiez-vous des excès d’instaticité…

Surtout les soirs de lune rouge.

Vous risqueriez de vous retrouver félin-féline

Et d’y laisser votre peau.

ON M'APPELAIT OSCAR

 

 

 

REFRAIN: J'étais le squelette de la classe

On m'appelait Oscar

Suspendu près du tableau noir

Je balançais ma vieille carcasse

En os! En os! 

 

J'ai vu défiler des générations

De jeunes élèves plein d'imagination

Des têtes blondes bourrées d'audace

Pierrot qui m'a laissé sa dédicace

Bien gravée dans mon tibia

Qu'est-il devenu celui-là?

Albert et ses grimaces:

"Oscar ! Regarde!"

Le p'tit Léon perspicace

Qui tous les matins vérifiait

Si j'étais en plastique ou en vrai

Julie le jour des morts tous les ans

Déposait à mes pieds un bouquet

Comme le lui avait dit sa maman

Pour que mon âme libérée

S'envole! S'envole! 

                                                                      REFRAIN

 

Un jour pour faire une blague au professeur

Ils m'ont assis sur le rebord extérieur

De la fenêtre, les jambes dans le vide

Casquette sur le crâne, mégot, foulard

J'étais leur complice, leur caïd

Ils agitaient tous leurs mouchoirs

En sanglotant "Oscar ! Oscar ! Au revoir"

Pouffaient sous leurs tignasses

Le professeur n'a pas aimé

A demandé qu'on me débarrasse

Qu'on me redonne ma place et ma dignité

Une maladresse... La chute atroce

Je tombe, je m'écrase, me v'là, c'est rosse

Broyé, cassé, un p'tit tas d'os

Par terre! Par terre! 

                                                                      REFRAIN

 

Je suis devenu un fantôme

Qui s'ennuie de ses mômes

J'voudrais bien retrouver mes os

Au moins le tibia signé Pierrot

Mon os! Mon os! 

 

(sacem 1992)